L’Ain tire la sonnette d’alarme sur l’accueil des mineurs non accompagnés

L’Ain tire la sonnette d’alarme sur l’accueil des mineurs non accompagnés
Photo d'illustration

Le Département explique aujourd’hui (mercredi) se heurter « à un phénomène de saturation des structures d’hébergement » suite à une arrivée massive liée aux récents mouvements migratoires.

Le Président de l’Ain, Jean Deguerry, a alerté la Préfète sur cette problématique afin de trouver des solutions. Le Département a notamment décidé de recourir à un de ses bâtiment normalement dédié à l’accueil de vacances des agents départementaux, qui accueille aujourd'hui près de 50 jeunes, et ouvrira également des places prochainement pour 2 mois sur un site de Jasseron. Il dénonce toutefois des « réticences locales […] fortes » pour l’accueil de ces mineurs. 

Les précisions du Département de l'Ain :

ACCUEIL DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS (MNA) - Le Département de l’Ain tire la sonnette d’alarme

Depuis 2013, dans le cadre de sa mission de protection de l’enfance, le Département a la responsabilité de l’accueil, l’évaluation, l’hébergement et la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA). Le mouvement migratoire, constaté notamment en Italie, provoque un afflux en France de mineurs africains isolés. Face à cette arrivée massive, le Département de l’Ain se heurte à un phénomène de saturation des structures d’hébergement. Ne pouvant plus assurer sa mission de protection de l’enfance dans de bonnes conditions, Jean Deguerry, Président du Département de l’Ain, tire la sonnette d’alarme. Il vient d’alerter Mme la Préfète sur les problématiques auxquelles le Département de l’Ain se trouve confronté face à l’afflux de MNA dans l’Ain.

MNA dans l’Ain : une croissance exponentielle

Comme de nombreux Départements, l’Ain connait une augmentation continue du flux de mineurs non accompagnés, arrivés sur le territoire aindinois soit directement, soit réorientés par la cellule nationale du ministère de la Justice*. Actuellement, le Département de l’Ain prend en charge 329 MNA dont 232 sont arrivés depuis le 1er janvier 2023 (142 arrivées directes et 90 réorientations par la cellule nationale). Les projections d’ici à la fin de l’année se situent aux alentours de 300 arrivées dans l’Ain, sachant qu’une nouvelle clé de répartition devrait être annoncée prochainement par le Gouvernement, ce qui fait craindre un nombre important de réorientations à venir compte tenu des nouveaux critères énoncés.

Le Département de l’Ain constate des évolutions dans les profils des jeunes accueillis avec un rajeunissement des jeunes à leur date d’arrivée et un public féminin de plus en plus nombreux qui nécessitent d’adapter les politiques d’accompagnement. A cela, s’ajoutent les évolutions de la loi Taquet qui, dans le cadre de son plan de lutte contre les sorties sèches de l’ASE, impose au Département de garantir une prise en charge jeune majeur à toute personne de moins de 21 ans n’ayant pas les conditions nécessaires pour subvenir à ses besoins. Ces éléments cumulés ont comme impacts directs un allongement de la durée moyenne d’accompagnement.

Accueil des MNA : un défi pour le Département de l’Ain

Le Département de l'Ain, s’il entend continuer à remplir avec humanité ses missions d’accueil et de protection des MNA, est aujourd’hui confronté à un phénomène de saturation des locaux et de manque de personnel. Il est désormais dans l’incapacité de répondre à toutes ses obligations légales en la matière, qu’il s’agisse des besoins primaires, de soins et de scolarisation qui sont des enjeux majeurs.

La situation mobilise fortement ses agents et ses budgets au détriment de la protection de l’enfance pour les Aindinois. Le Département de l’Ain a ainsi consacré un budget de 5,6M€ aux MNA en 2022. Les dépenses pour 2023 vont atteindre 7,7M€ et les projections pour le BP 2024 s’établissent à 8,6M€. Mais surtout, le Département est souvent contraint d’agir dans l’urgence pour trouver des lieux d’accueil adaptés. Ces dernières semaines, les services départementaux ont dû avoir recours de manière importante à une mise à l’abri à l’hôtel. Néanmoins, les hôteliers souhaitent limiter dans le temps ces accueils pour conserver leur clientèle. Par ailleurs, la loi Taquet privera les Départements de cette possibilité au mois d’avril prochain, ce qui devrait accentuer ces problématiques d’hébergement.

Quelles solutions ?

Dans l’urgence et face à cette situation dramatique, le Département a décidé de recourir à un de ses bâtiment, le Chalet des Loges au Grand Abergement, normalement dédié à l’accueil de vacances des agents départementaux. Celui-ci accueille aujourd'hui près de 50 jeunes, pour une capacité initiale de 24.

Le Département de l’Ain travaille également à ouvrir des places pérennes, à travers des bâtiments modulaires sur le site de l’ancienne agence routière à Ambérieu-en-Bugey. Il accompagne aussi Alpha3A dans son projet de reprise de l’ancienne Ehpad de Valserhone. Cependant, ces solutions mettent du temps à se concrétiser.

Il ouvrira également des places prochainement et pour 2 mois sur un site de Jasseron.

Si d’autres solutions existent sur le territoire, notamment en lien avec des dispositifs prévus pour l’accueil de réfugiés ukrainiens, les réticences locales sont fortes pour accueillir ces MNA.

Chaque jour qui passe, la situation se dégrade compte-tenu des arrivées directes régulières alors que le Département ne dispose plus de places d’hébergement. Le risque de rupture totale de notre dispositif est avéré, malgré notre bonne volonté.

Le Président Deguerry a saisi Mme la Préfète de l’Ain pour trouver des solutions.

Si la situation devait se dégrader encore – ce qui est fort probable compte-tenu du contexte international lié aux migrations - le Département devra suspendre temporairement l’accueil des MNA, avec toutes les conséquences humaines, juridiques et administratives de cette décision.